Mercredi 12 août 2020
Alors Ormos ça veut dire crique. On peut dire Port aussi mais ce n’est pas un port… Il est quand même temps de lever l’ancre de cette crique aussi belle et agréable soit elle. Car le plaisir ici en bateau c’est justement de changer et découvrir d’autres lieux, d’autres gens, des atmosphères différentes, parfois même des odeurs singulières. Le problème c’est le nombre vertigineux de mouillages possibles, une vie n’y suffirait pas. Alors on se laisse aller à son intuition, il ne faut pas trop planifier et préparer car c’est le chemin le plus sûr vers la folie et certainement pas celui de la philosophie grecque.

Initialement je voulais aller à la crique Kalami. Mais en longeant cette côte magnifique de cyprès tombant dans la mer, j’aperçois un mouillage paisible avec juste un voilier et bordé d’une petite plage où barbotent des locaux. Et là une scène unique se présente à moi. Le seul endroit vraiment possible pour moi pour mouiller l’ancre, car les fonds sont assez profond, est occupé par un bateau à moteur avec plusieurs personnes à bord. Voyant que je tourne autour du mouillage en quête d’un bon endroit pour m’installer, ils me font signe, remontent leur ancre et vont un peu plus loin. Jamais, j’ai bien dit jamais vous ne verrez une telle attitude en Europe occidentale de l’Espagne à l’Italie en passant bien sur par la France !
L’endroit est parfait, calme comme un lac, une lisière de mer qui fait penser à la Croatie avec de somptueux cyprès qui bordent l’eau. Et sur le bord, des personnes âgées et quelques familles qui barbotent avec leurs serviettes à l’ombre de grands eucalyptus dont les senteurs embaument le mouillage.



La fin de journée arrive, je me glisse doucement dans une eau d’une rare douceur pour me rafraîchir d’une chaleur encore intense. Je reste 30 minutes à barboter et rejoindre le rivage où une femme polonaise, ayant aperçu Solenzu sur le bateau, me montre des photos de son chat resté en Pologne pour les vacances. Sans intérêt mais sympathique rencontre. Je retourne au bateau prendre ma douche pour aller ensuite un peu plus loin vers un tout petit port de barques prendre un verre à la Taverna du coin. Hélas, elle est fermée et sur le retour je suis appelé par l’équipage du deuxième voilier. C’est un couple d’italiens mais lui est français. On discute ainsi sur la Grèce, moi sur mon annexe et eux sur le pont de leur voilier.

Jeudi 13 août
Place à l’ormos suivant distant de… Juste derrière ! Changement de décor, après celui de la veille, nature et authentique, j’arrive dans une large baie avec au sud une forêt et des barques locales à des bouées et sur le reste de la baie une longue plage avec parasols et Tavernas. En gros le tourisme de masse à la grecque. Mais rien à voir avec une plage du même type en France. Ici tout est dans la mesure. Pas d’immeuble mais de petites maison au style désuets. Pas de brasseries ou glaciers géants mais 3 ou 4 Tavernas en bord d’eau. Personne sur la plage les uns sur les autres. Une bonne ambiance sympathique comme un bord de mer de méditerranée français d’il y a 70 ans. Je mouille l’ancre là aussi au plus près de la plage et pars en exploration avec l’annexe, sans moteur, pour ne pas foutre ma pagaille parmi les nageurs. Je pense qu’il y a comme un pacte moral ici. On fout pas le bordel même s’il n’y a aucune interdiction pour nous empêcher de le faire…
J’ai jeté mon dévolu pour le dîner. The white house. Rien à voir avec Trump mais c’est le nom d’un restaurant très joli, tout blanc, qui surplombe la baie. C’est l’ancienne maison de l’écrivain voyageur britannique Lawrence Durell, dont j’ai un livre à bord, passionné par la Grèce. La vie de ce personnage du XXe siècle est exaltante. Né au début du siècle au sein de l’empire Britannique des Indes Orientales, il aura donné à la Grèce ses plus beaux écrits de voyage. Tantôt descriptif, tantôt historique, toujours juste et onirique. Le dîner se passe seul à une table un peu en hauteur à observer tout ce petit monde à majorité anglo saxonne. Un petit groupe de jeunes trentenaires hautains de London entre pour dîner. 6 têtes à claques. 3 nanas, 3 mecs. On sent que ces 6 là bossent dans la finance ou le marketing. Des pantacourts aux couleurs audacieuses, un style faussement décontracté. Les mêmes qu’à Paris. Je les aime pas.
Je reste ainsi toute la soirée à déguster un vin blanc Résiné. C’est un procédé hérité de l’antiquité où, pour conserver le vin, on ajoute de la résine de pin. Le bouquet et le goût sont caractéristiques. Ce n’est pas ce que l’on pourrait qualifier un bon vin mais c’est un breuvage doux qui, en une gorgée, vous fait communier avec ce pays et cette terre odorante à dominante de pins.
Bon à savoir :
Le mouillage situé dans la crique juste au-dessus de Kerasia est un havre de paix mais pour 2 ou
3 bateaux car les fonds remontent vite.Je déconseille le restaurant de Kérasia de White House. Très commercial avec un accueil désagréable et un
prix élevé.
Rien a dire de plus « que c’est beau »…
Et le rêve continue c’est exactement un retour en arrière je pense que tu vis un moment particulier qu’il faut savourer comme un bon vin.
Gros bisous Sylvie Robert
J’aimeJ’aime