Mardi 20 juillet
Il est 7h30 je relève doucement le mouillage dans un silence de cathédrale que ne perce même pas les cigales qui dorment encore. Pas une ride sur l’eau dans la baie. Je mets le cap vers le large pour contourner l’île, embouquer le canal entre Kea et Makronisos, longue et étroite île entre le continent et les Cyclades.
Une lourde houle nous cueille dès que nous sommes au large. Il s’agit du reste du fort vent de sud de la nuit. Pour l’instant il n’y a pas assez d’air pour avancer à la voile ce qui n’est pas problématique car nous devons faire du cap vers le sud-sud-ouest. Mais les estomacs sont mis à rude épreuve. En bas Doriane dort et c’est tant mieux pour elle.
Le vent commence à entrer en jeu et adonner ce qui me permet de maintenir mon cap et éteindre le moteur pour les 40 milles qui nous restent à parcourir. Je dois rester vigilant car la zone est soumise à un trafic assez intense de cargos, pétroliers et ferrys qui relient les îles entre elles. Nous faisons route de plus en plus vite au fur et à mesure que le vent fraichit.
Nous arrivons bientôt à doubler le cap Sournion et à saluer le fameux temple de Poseidon.
Nous devons tirer un bord dans ses parages pour positionner le bateau sur la route de l’île de Methana, notre prochaine escale avant de rallier l’île d’Egina le lendemain. Le golfe Saronique est de toute beauté et tranche radicalement avec les paysages de Cyclades. Ici tout est couvert d’une végétation dense de pins et de cyprès. Nous sentons même les essences depuis la mer. À perte de vue ce ne sont qu’îles, hautes ou basses, couvertes de pins, avec une densité de constructions quasi nulle.
Dès notre entrée dans la magnifique baie de Methana, nous croisons à quelques mètres, un troupeau de dauphins de 6 ou 7 individus, mais, trop occupés à vaquer à leurs occupations, ils ne daignent pas jouer avec nous. Il est 18h et nous arrivons en vue de l’île de Methana. Depuis la mer c’est une montagne plantée dans la mer avec des vallées couvertes de végétation. À cette heure de la journée et ses contrastes on croirait arriver aux Marquises. Methana s’appelle ainsi car il s’agit d’un volcan en sommeil mais actif qui dégage à certains endroits des effluves de souffre.
L’entrée de la marina est petite difficile à voir depuis le large, c’est au dernier moment qu’on la distingue clairement. Il y a deux choix ici, soit le port public qui n’est en fait que le quai du ferry que l’on peut occuper en mouillant l’ancre, soit la Marina près des bains de souffre qui est un port privé et qui n’autorise aucun visiteur. Sauf nous ! Doriane a pris soin d’appeler avant et nous pourrons occuper la place d’un plaisancier pour la nuit.
L’arrivée est étrange. D’emblée nous sommes accueillis par l’odeur de souffre et frappés par la couleur de l’eau du port, blanche ! Alors que nous arrivons sur le plan d’eau du port, une femme hyper autoritaire nous crie dessus pour nous indiquer notre place. Mais la forme n’étant parfois pas évocatrice du fond, cette personne s’est avérée charmante une fois à terre.

Nous sommes fatigués de cette longue journée de navigation dans une mer agitée et partons en quête d’un apéro et d’un dîner dans une taverne après une douche revigorante. Le site est d’une beauté étrange, comme hors du temps, il n’y a quasi personne dans ce que l’on pourrait qualifier l’endroit de station balnéaire en fin d’heure de gloire. La ville est toute petite, au pied de l’eau et de la grande montagne qui l’écrase de sa majesté. Peut être là aussi, comme Stromboli, l’influence écrasante du volcan. Nous retournons ensuite au bateau écrasés de soleil et de vent, heureux d’être là.



